Un nouveau genre littéraire sur la nature donne vie aux aspects sauvages et délicats de la crise climatique
Nous vivons à une époque d’urgence climatique et d’éco-anxiété. Après tout, nous sommes en pleine période d’Anthropocène, une période géologique définie par l’empreinte laissée par l’homme sur la Terre. Témoigner de notre place dans le monde est plus que jamais essentiel, mais écrire sur la nature en période de crise écologique sans impliquer un désespoir total est un véritable défi.
Depuis 2009, j’enseigne un master en écriture sauvage qui explore la littérature, le paysage et l’environnement. Les étudiants sont encouragés à trouver leur propre voie – créative et critique – dans la manière dont nous, les humains, interagissons avec le monde naturel, les lieux que nous habitons et les créatures avec lesquelles nous partageons la Terre. Les sorties scolaires – la classe en plein air – sont un élément central de la pratique de l’étude. Nous nous rappelons que nous faisons partie de la nature – jamais séparés, jamais séparés, pas même dans la structure carrée de la salle de séminaire. Exister en tant qu’humain, c’est être dans la nature. La nature n’est pas un endroit où nous entrons et sortons. C’est une vérité essentielle.
Depuis le lancement de ce cours, l’écriture sur la nature a évolué. En 2008, le journaliste Jason Cowley a reconnu que le genre de l’écriture sur la nature était en pleine transformation. Dans un numéro spécial de la revue littéraire Granta consacré à la nouvelle écriture sur la nature, il expliquait que « la meilleure nouvelle écriture sur la nature est une expérimentation de formes : le rapport de terrain, l’essai, le mémoire, le récit de voyage ».
Going to Ground: An anthology of nature and place, édité par l'écrivain naturaliste Jon Woolcott, est un excellent recueil de tels écrits. Véritablement captivant, le collectif de plus de 30 écrivains nouveaux et confirmés offre des voix lumineuses et fraîches sur notre sens du lieu, notre place dans la nature.
Les textes réunis ici – en prose comme en poésie – sont tous des récits de l’Anthropocène. Ils parlent de terres meurtries, de terres sacrées. Ils ont vu le jour pour la première fois au cours de la décennie précédente en tant qu’offrandes pour The Clearing – un magazine en ligne qui a contribué à promouvoir de nouvelles perspectives sur l’écriture sur la nature, notamment des portraits de l’ère post-industrielle ainsi que des réflexions politiques et réflexives sur nos paysages modernes.
Il s'agit de visions que l'on a déjà vues dans des ouvrages antérieurs, comme The Unofficial Countryside de Richard Mabey (publié en 1973), qui, selon le légendaire écrivain paysagiste et vagabond Iain Sinclair, était « le pivot méconnu entre les nouveaux écrivains naturalistes et ces autres, d'une dispensation plus grunge, qui sont rassemblés au hasard (et de manière trompeuse) sous le nom de « psychogéographes » ». Sinclair devrait le savoir, étant l'un des plus connus de ce troupeau.
Les contributions à Going to Ground se lisent comme une série de tremplins – dignes d’une anthologie largement encadrée autour de l’archipel de nos îles. L’écrivain Graham Mart nous emmène dans un « paysage qui se vide de sa raison d’être », retraçant les traces de générations d’anciens à travers les villes des landes du Yorkshire du Nord – Settle, Hawes, Muker – en voyant le naturel dans l’industriel. Il écrit poétiquement sur les « plongeurs sur le ruisseau / les rochers calcaires parsemés de genévriers ».
Comme tant d’autres de ces écrits, une mosaïque de souvenirs émerge, assemblée à partir de la terre.
JC Niala nous emmène au-delà de la Grande-Bretagne, au Kenya, où d’anciens habitants des cavernes vivaient « une danse complexe avec les éléphants » qui venaient dans ces espaces sombres la nuit pour extraire du sel avec leurs défenses. La magie de cette vision aide Niala à chasser le fantôme du COVID qui hante son voyage.
Deux des grands noms du nouveau mouvement d’écriture sur la nature sont également présents ici. Avec Findings (2005), Kathleen Jamie se situe entre le monde quotidien de la vie domestique, de la lessive et des trajets scolaires des enfants, et les moments d’enchantement dans la nature. Ici, dans Going to Ground, Jamie nous guide vers l’importance de prêter attention, d’être attentif, de remarquer le monde naturel. « Comment perdons-nous le monde ? », s’interroge-t-elle. « Petit à petit. »
Au lieu d’ignorer le monde qui nous entoure, nous pouvons « sérieusement le remarquer » – sortir et « sentir l’automne dans le vent ». Ce faisant, nous allons au-delà du statut de consommateurs passifs dans « l’acte le plus simple de résistance et de renouveau ». Soyez engagés, soyez présents, exhorte-t-elle.
Dans un chapitre intitulé Bird Island, l’écrivain et ornithologue Tim Dee observe les fous de Bassan se préparer à décoller « du bord de leur domaine terrestre, la piste piétinée par le gravier et le guano vers le ciel ». Cette image fonctionne bien comme métaphore des efforts de ce groupe remarquable d’écrivains naturalistes réunis dans cette délicieuse anthologie – chacun cherchant à aller au-delà des terrains de jeu épuisés, ressentant le besoin de nouvelles perspectives sur les paysages de l’Anthropocène.
James Canton, Maître de conférences en littérature, Université d'Essex